Les chiffres ne mentent jamais
Un nouvel échange de prisonniers confirme l’ampleur des pertes subies par Kiev
Un nouvel échange de dépouilles de soldats russes et ukrainiens a eu lieu de 20 novembre entre Kiev et Moscou. Les Russes auraient livré 1 000 corps, mais n’en auraient récupéré que 30. Le bilan annoncé par le Kremlin, qui n’a à notre connaissance pas été contredit, fait état d’un ratio de 1 : 78 depuis le début du conflit.
La Russie et l’Ukraine ont procédé jeudi à un nouvel échange de dépouilles de soldats ainsi que le prévoient les accords d’Istanbul. Il y a quelques mois, le président Zelensky avait refusé, pour des raisons économiques et stratégiques, d’honorer cette partie du contrat. Il a finalement dû reculer sur la pression des mères et des veuves de soldats. Au-delà du coût financier que représente le versement des pensions, accordé uniquement en cas de décès, le nombre de corps restitués par chacune des parties est en effet une donnée essentielle pour évaluer de manière objective la dynamique du rapport de force sur le front.
L’un des arguments utilisés par le chef de l’État pour dénoncer la barbarie de la Russie serait son acharnement à poursuivre un conflit où elle est en échec en sacrifiant des centaines de milliers d’hommes :
On ne connaît pas le bilan précis de cette guerre, mais on sait que la Russie a perdu dans son dessein plus d’un million de soldats tués ou blessés pour conquérir moins d’un pour cent du territoire ukrainien depuis novembre 2022.
D’où sortent ces chiffres ? Bien que l’Ukraine soit un allié des Occidentaux, ni le président français ni les médias ne se disent en capacité de chiffrer ses pertes. Comment peuvent-ils avoir sur ce principe une connaissance précise du nombre de soldats russes morts sur le front ?
Selon Mediapart citant l’AFP, la Russie aurait remis à Kiev, ce 20 novembre, 1 000 dépouilles de soldats « prétendument ukrainiens ». Le dernier échange aurait eu lieu fin octobre et concernerait le même nombre de corps. L’article ne précise pas le nombre de dépouilles russes restituées en contrepartie par l’Ukraine, mais Le Figaro évalue à 15 000 le nombre de dépouilles ukrainiennes rendues par la Russie depuis le début de l’année, contre seulement quelques centaines restituées par Kiev.
En juin dernier, le Kyiv Post annonçait, en citant des sources ministérielles russes, un échange portant sur 1 248 corps de soldats ukrainiens vs 51 militaires russes, pour un total de 6 060 dépouilles remises par Moscou vs 78 réceptionnées en retour. On parle donc d’un ratio dramatique de 1 : 78. Celui-ci s’explique probablement par les méthodes d’enrôlement forcé utilisées Kiev, qui conduisent à envoyer sur le front des civils sans formation pour faire perdurer artificiellement le conflit. Les dernières images de rafles diffusées sur les réseaux sociaux montrent que le régime a atteint un point de retour dans la barbarie :
Le Moscow Times évoque aujourd’hui un ratio de 1 000 corps contre 30 à la faveur de la Russie lors de l’échange du 20 novembre. L’agence de presse TASS, l’équivalent russe de l’AFP, n’a pas, à notre connaissance, publié d’article concernant cette transaction, mais le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, évoquait la semaine dernière un rapport de 9 000 corps de soldats ukrainiens échangés depuis le début de l’année contre 143 dépouilles russes (1 : 63).
Si ces chiffres sont confirmés, le refus du président ukrainien d’accepter l’accord de paix proposé par Donald Trump relèverait de la folie pure. Une seconde conclusion s’imposerait alors : comment la Russie peut-elle avoir perdu d’un million de soldats si les pertes ukrainiennes sont 30 à 78 fois plus élevées ? De deux choses l’une, soit l’état-major français sait que ce bilan est frauduleux et il envisage une confrontation avec un ennemi qu’il sait beaucoup plus redoutable qu’il ne le prétend, soit il pense sérieusement que ce bilan est juste et il échafaude une stratégie sur des bases erronées, ce qui, dans un cas comme dans l’autre, est profondément inquiétant.