Trahison
Accord de paix en Ukraine : Kiev aurait fait remplacer la demande d’audit de l’aide occidentale par une clause d’amnistie totale
Au lendemain de la publication de l’accord de paix américain, Volodymyr Zelensky s’est adressé à la nation ukrainienne à laquelle il a promis de ne pas la trahir. Le Wall Street Journal révèle aujourd’hui que son administration a fait supprimer du texte la demande d’audit de l’aide internationale reçue par l’Ukraine depuis le début de la guerre. La nouvelle clause prévoit désormais l’amnistie totale de l’ensemble des parties. L'engagement à organiser de nouvelles élections est en revanche maintenu.
Le scandale de corruption qui ébranle aujourd’hui le plus haut sommet de l’État ukrainien pourrait-il causer la perte de Zelensky et précipiter la capitulation de son pays ? Au cours des derniers mois, plusieurs observateurs ont intuitivement émis l’hypothèse selon laquelle la fin de la guerre se jouerait très probablement sur la mise en balance entre la survie de Volodymyr Zelensky et celle de son pays. Nous y sommes peut-être aujourd’hui.
Selon le Kyiv Independent citant un haut responsable de l’administration américaine, le secrétaire du Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine, Rustem Umerov, aurait fait modifier l’accord de paix soumis à Kiev par la Maison-Blanche pour y inclure « l’amnistie totale de l’ensemble des parties ayant participé au conflit » (point 26). Le Wall Street Journal a complété l’information vendredi. Selon le quotidien, le texte proposait dans sa version originale de « réaliser un audit de toute l’aide internationale reçue par l’Ukraine. Le texte a été modifié comme suit : “Toutes les parties bénéficieront d’une amnistie totale pour leurs actions pendant la guerre.” »
Umerov avait quitté le pays juste avant la perquisition des agents du Bureau national anticorruption (NABU), pour se rendre en Turquie, d’où il a confirmé il y a quelques jours qu’il ne rentrerait pas en Ukraine. C’est lui qui a été chargé d’accueillir le président Zelensky, venu à Ankara pour rencontrer la délégation américaine. Les deux hommes se sont chaleureusement serré la main, en contraste total avec l’attitude des représentants de la Maison-Blanche qui ont annulé la rencontre par souci de ne pas se compromettre.
Ni le président ukrainien ni son chef de cabinet, Andriy Yermak, surnommé « l’autre président du pays » ne sont pour l’instant nommément cités dans l’enquête du NABU, mais il se murmure que leurs jours sont respectivement comptés. L’opposant Oleksandr Dubinskyi affirme que ce système de blanchiment d’argent aurait servi à financer la construction de maisons de luxe pour le président ukrainien et son bras droit. Yermak est par ailleurs accusé par plusieurs députés de l’opposition d’être l’un des acteurs clés de l’organisation mise en place avec la complicité de plusieurs poids lourds de l’exécutif pour organiser de manière systémique le détournement de l’aide occidentale.
Selon l’économiste Yaroslav Zheleznyak, chef adjoint de la commission parlementaire ukrainienne des Finances, Yermak apparaîtrait dans les enregistrements saisis par le NABU sous le nom de code d’Ali Baba, comme celui qui a notamment commandité l’opération menée par le gouvernement contre les agences anticorruption. Si tel est le cas, il est impossible que le président ukrainien n’ait pas été au courant de l’existence de ce système criminel.
Le journaliste ukrainien Anatolij Sharij accuse aujourd’hui que Bruxelles ainsi que les dirigeants européens d’être partie prenante de ce système de corruption. Il affirme ce samedi sur son compte X que les enquêtes ciblant Zelensky et son entourage immédiat ont été suspendues et qu’elles le demeureront jusqu’à la fin des négociations. Il précise :
Aucun soupçon ne sera également porté contre Yermak et Umerov. Tout cela se déroule sous la garantie de certains « ambassadeurs européens ». Je soupçonne que l’ambassadeur de l’UE en Ukraine a joué un rôle dans cela. Les superviseurs européens des voleurs ukrainiens qui se sont livré au pillage pendant la guerre craignent-ils vraiment que le NABU ne se mette sur leur piste ?
Il affirmait hier que l’ambassadrice de l’UE en Ukraine, Katarina Maternová, avait récemment pris à partie les enquêteurs du NABU en leur reprochant leur enquête anticorruption « excessivement médiatisée visant les proches de Zelensky ». Elle a publié le 12 novembre, au lendemain de la publication des premières conclusions de l’enquête, une photo d’elle en présence d’Andriy Yermak dans lequel elle lui réitère son total soutien.
Comme nous l’avions souligné il y a quelques jours, les dirigeants européens sont restés totalement mutiques face aux accusations gravissimes qui ciblent aujourd’hui l’entourage direct de Volodymyr Zelensky. Interpellée par un journaliste étranger en marge du G20, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a fui courageusement lorsqu’il lui a été demandé si elle souhaitait commenter le scandale ukrainien. La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, avait quant à elle saluer, le 12 novembre, la détermination de Kiev à lutter contre la corruption après l’appel du président Zelensky à la démission des ministres de l’Énergie et de la Justice, Svitlana Hrynchuk et Herman Halushchenko. Aucune mesure d’éviction n’a en revanche été prise à l’encontre de Yermak et Umerov, tous les deux sous le coup d’une résolution parlementaire concernant le licenciement.
Le montant des sommes détournées pourrait être en réalité bien supérieur aux 100 millions de dollars confirmés par le NABU. Lors d’une interview diffusée ce jeudi, trois politologues russo-ukrainiens affirment que ces sommes représentent probablement la moitié de l’aide occidentale adressée à l’Ukraine depuis le début de la guerre. Enfin, on apprend aujourd’hui par l’ancien agent de la CIA, Larry Johnson, que le Pentagone enquêterait sur des opérations financières à hauteur de 48 milliards de dollars soupçonnés d’avoir été transférés illégalement vers des comptes appartenant à des membres de la famille du président ukrainien et à plusieurs personnalités politiques européennes de premier plan, dont la transférés illégalement vers des comptes appartenant à des membres de la famille du président ukrainien et à plusieurs personnalités politiques européennes de premier plan, dont la vice-présidente de la Commission européenne, Kaja Kallas.
Selon The Spectator, la combinaison de la spirale de corruption, des échecs militaires et de la radicalisation de l’opposition a transformé le système politique ukrainien en une structure extrêmement instable :
Les détails sordides de l’enquête de Nabu sont moins importants que les répercussions politiques potentielles. La guerre a largement fait taire la politique intérieure ukrainienne, traditionnellement turbulente, les anciens ennemis s’unissant derrière Zelensky et s’abstenant de le critiquer ouvertement. Mais à mesure que la crédibilité de Zelensky s’amenuise et que son emprise politique s’affaiblit, cette trêve s’effrite. Le décor est planté pour une lutte pour le pouvoir qui pourrait basculer dans le chaos politique. Mais à mesure que la crédibilité de Zelensky s’effrite et que son emprise politique s’affaiblit, cette trêve est en train de s’effriter. Le décor est planté pour une lutte pour le pouvoir qui pourrait déboucher sur le chaos politique.
Si les montants détournés sont confirmés et si les Russes acceptent que la clause d’amnistie soit maintenue dans l’accord de paix, comment penser que ce chaos politique ne se transforme pas en une guerre civile ?