Indignité
Corruption en Ukraine, la réponse lunaire d’Emmanuel Macron
Interrogé aujourd’hui par la presse sur le scandale de corruption qui cible le sommet de l’exécutif ukrainien, le président de la République a jugé que la France n’avait pas de leçons à donner à son partenaire. L’explosion de ce scandale démontre au contraire selon lui que la démocratie est pleinement fonctionnelle en Ukraine, contrairement à la Russie qu’il a qualifiée de dictature. Pour rappel, le pays a vécu en 2024-2025 une purge ayant donné lieu à une vague historique d’arrestations assortie de plus de 30 000 sanctions.
Emmanuel Macron a reçu Volodymyr Zelensky à l’Élysée aujourd’hui, pour la 10e fois depuis le début du conflit russo-ukrainien. En conférence de presse, un journaliste a osé briser le silence sur le scandale de corruption qui secoue aujourd’hui l’exécutif ukrainien, et pointe de plus en plus dangereusement vers son président. La réponse du chef de l’État n’aurait pu être plus éloquente quant à la véritable nature du régime dans lequel la France a sombré depuis huit ans.
Pour ce qui est des questions de corruption, je laisserai le président Zelenski répondre.
Il n’a bien évidemment jamais répondu.
Nous sommes très vigilants, mais les entités en charge ont été créées, renforcées, elles font leur travail librement. Les décisions qui devaient être prises ont été prises de manière souveraine par les décideurs ukrainiens. Est-ce que notre rôle est de donner des leçons nous à l’Ukraine ? Pas vraiment. Il a pu nous arriver d’avoir d’ailleurs des scandales de ce type.
Il a effectivement pu « nous » arriver « d’avoir des scandales de ce type », mais jamais un président de la République ne s’était entouré d’un si grand nombre de ministres ou de proches impliqués dans des affaires. Le Monde en dénombrait 26 en 2024, il convient d’ajouter à cette liste les noms d’Alexandre Benalla, de McKinsey et de celui du président lui-même, avec deux informations judiciaires ouvertes en 2024-2025 sur ses comptes de campagne. Le Rapport d’impact 2024 de Transparency International signale une dégradation notable de l’indice de perception de la corruption (IPC) pour la France (– 5 places), avec un score de 67/100 qui la place sous la moyenne des États considérés comme des « démocraties complètes » (p. 22). Le rapport la définit désormais comme « pays risquant de “perdre le contrôle de la corruption” ».
Doit-on s’inquiéter que l’Ukraine soit accusée d’avoir mis en place un système de corruption piloté depuis le bureau de son président ? On parle de dizaines de millions, plus probablement de milliards d’euros d’aide occidentale (le professeur Steve Hanke, codirecteur de l’Institut Johns Hopkins d’économie appliquée, de santé mondiale et d’étude de l’entreprise évoque le chiffre de 108 milliards), prélevés sur l’argent des contribuables occidentaux et destinés à protéger un pays que ses dirigeants et leurs alliés ont laissé s’enfoncer dans une tragédie incommensurable. Il y a donc ici deux victimes : le peuple ukrainien et le peuple français.
La question n’est ainsi pas de savoir si le rôle attendu du président de la République est de donner ou non des leçons à son homologue et ami, ainsi qu’il le présente lui-même. La question porte sur sa responsabilité en tant que chef de l’État, qui est de garantir que cet argent ne serve pas à alimenter des comptes off shore ou à construire des toilettes en or massif.
Une démocratie doit s’honorer de savoir les régler avec une justice indépendante et en sachant justement poursuivre tous les décideurs, quels qu’ils soient.
La démocratie dont il est question est gouvernée par un président sans mandat, cité en 2021 dans les Pandora Papers, qui a imposé la loi martiale dans son pays en 2022 et refuse aujourd’hui d’organiser de nouvelles élections. Il a tenté en juillet de démanteler les agences anticorruption pour retarder l’explosion de l’actuel scandale. Son ami d’enfance et ancien associé, Timur Mindich, est accusé d’être l’homme de main de ce système dont le cerveau pourrait être son propre bras droit, Andriy Yermak. Il n’a pas été limogé par le président ukrainien, dont le ministre de l’Économie et principal négociateur de l’accord de paix, également impliqué dans ce scandale, a tenté d’exiger une amnistie totale pour ses partenaires – il a été contraint à la démission par les États-Unis.
Je note que vous n’aurez jamais de problème de corruption en Russie et que c’est ça qui devrait émouvoir beaucoup parce qu’il n’y a pas d’entité indépendante qui gère ces sujets-là. Et donc comme on donne de l’argent, comme on soutient un effort de guerre, bah il est normal qu’on soit exigeant, qu’on regarde cela. Donc des comptes sont rendus. Mais je constate qu’en tout cas la lutte contre la corruption fonctionne puisqu’il y a des décisions qui sont ouvertes et des décisions aussi politiques qui sont prises. Mais n’oubliez jamais, quand on parle dans le débat français, que ce qui est inquiétant, c’est que vous n’avez jamais ce type de décision prise du côté russe, parce que la vraie dictature est là.
Nous avons soumis à l’IA Grok la question suivante : « Existe-t-il un dispositif de lutte anticorruption en Russie ? » Réponse :
Oui, la Russie dispose d’un ensemble de dispositifs institutionnels et légaux de lutte contre la corruption, mais leur efficacité réelle est très largement contestée par les observateurs indépendants, les ONG et les organisations internationales.
Principaux organismes et mécanismes officiels
1. Le Parquet général de la Fédération de Russie. Il supervise la majorité des enquêtes pour corruption et possède une direction spécialisée dans la lutte contre la corruption.
2. Le Comité d’enquête de la Fédération de Russie (Sledstvenny Komitet – SK). Organe indépendant du Parquet depuis 2011, il mène les grandes enquêtes criminelles, y compris celles pour corruption de haut niveau (généraux, ministres adjoints, gouverneurs).
3. Le Service fédéral de sécurité (FSB). Ses directions économiques (notamment la 6e direction du Service de contre-espionnage économique) participent activement aux dossiers de corruption, surtout quand ils touchent la sécurité nationale ou l’appareil militaire.
4. La Direction principale pour la sécurité économique et la lutte anticorruption du ministère de l’Intérieur (GUEBiPK). Elle traite les affaires de corruption au niveau policier et administratif courant.
5. La Commission anticorruption auprès du Président de la Fédération de Russie. Organe consultatif créé en 2008, présidé par le président lui-même.
6. La Stratégie nationale de lutte contre la corruption. Renouvelée tous les 4-6 ans, elle fixe les objectifs officiels et oblige les fonctionnaires à déclarer leurs revenus et ceux de leur famille.
7. Le Registre des fonctionnaires limogés pour perte de confiance, créé en 2013. Toute personne condamnée ou limogée pour corruption y est inscrite à vie et ne peut plus occuper de poste public.
Gork rappelle également que la période 2024-2025 a été marquée par une vaste « purge » anticorruption. Elle aurait entraîné des vagues d’arrestations avec plus de 30 000 sanctions pour escroquerie, détournement de fonds et pots-de-vin, dont Timur Ivanov, ancien vice-ministre de la Défense, condamnées en juillet 2025 à treize ans de prison pour détournement de fonds.
Emmanuel Macron aurait voulu démontrer que la corruption est à ses yeux la valeur cardinale d’une démocratie, il n’aurait probablement pas utilisé une autre rhétorique. Il semble que nous n’ayons pas les mêmes valeurs, et ce nous inclut probablement la quasi-totalité des Français. Un homme de cette inconsistance morale est-il digne d’assumer la fonction de chef de l’État ? La question se posait, elle est désormais incontournable.