Paranoïa occidentale

Mathilde Debord | 25 juin 2025

L’Occident se prépare à miner sa frontière avec la Russie et la Biélorussie

Les cinq pays de l’OTAN frontaliers avec la Russie et son allié biélorusse ont annoncé leur sortie de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel. L’objectif est de construire un rideau de fer explosif en anticipation d’une future tentative d’annexion. La ligne de démarcation s’étend de la Laponie à la Pologne.

Matériel de déminage, Ukraine, 2022
© Neznam

L’Europe s’apprête à ériger un nouveau rideau de fer pour se protéger d’une hypothétique invasion russe, rapporte The Telegraph dans son édition du 24 juin. Cinq pays sont concernés par ce projet, qui devrait se concrétiser par la dispersion dans l’environnement de millions de mines antipersonnel afin de sécuriser la frontière entre l’OTAN, la Russie et la Biélorussie : la Finlande, la Pologne et les États baltes composés de l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie.

À la veille de l’ouverture du prochain sommet de l’OTAN, les cinq chancelleries concernées par cette décision ont annoncé leur sortie prochaine de la Convention d’Ottawa, qui interdit depuis 1997 l’usage de ces munitions éminemment barbares et dont les pays signataires se sont engagés à détruire l’intégralité de leur stock. Le parlement letton l’avait entérinée il y a plus de trois mois.

Le calendrier est déjà arrêté : ces retraits devraient être officialisés en juin, par la voix de l’ONU, afin de permettre aux États de commencer à fabriquer et à déployer dès la fin de l’année ces munitions conçues pour tuer et pour mutiler. Selon The Telegraph, les discussions concernant les zones où seront dispersés ces engins de mort ont déjà commencé : l’heure est à définir quelles étendues de forêts et de terres lacustres seront ensemencées par ce poison, dont 164 pays ont estimé il y a trente ans qu’il faisait courir un risque insoutenable aux populations.

Fin mars, les ministres de la Défense de l’Estonie, de la Lettonie, de la Lituanie et de la Pologne avaient recommandé de quitter le traité d’Ottawa en assurant qu’ils s’efforceraient néanmoins de respecter le droit humanitaire. La Finlande, qui est devenue en avril 2023 le 31e pays membre de l’OTAN, et donc par la même, un possible terrain pour le déploiement d’armes nucléaires par l’Alliance, s’est officiellement ralliée à leur cause le 19 juin, par un vote du Parlement.

Cette décision se veut une réponse légitime à l’utilisation de mines antipersonnel par la Russie, qui n’est pas signataire de la Convention contrairement à l’Ukraine qui a pourtant fait usage de ces armes en 2023, devenant le premier État à violer le traité. Elle dénote toutefois une profonde paranoïa face à la supposée menace existentielle incarnée par Vladimir Poutine, dont les alliés de l’OTAN estiment qu’il pourrait déclencher une nouvelle opération à visée impérialiste d’ici trois à cinq ans, voire moins dans l’éventualité d’un cessez-le-feu permettant à la Russie de renforcer ses capacités militaro-industrielles. La Finlande en est convaincue et se prépare à une attaque potentiellement nucléaire. Construction de bunkers antiatomiques, fermeture de ses postes frontières, édification d’une clôture de près de 5 mètres de haut… tout s’est accéléré depuis son adhésion à l’OTAN.

Or nous ne savons toujours pas comment la Russie pourrait parvenir aux fins qu’on lui prête, sachant qu’en trois ans, ses armées n’ont réussi à s’emparer que de 12 % du territoire ukrainien (elle contrôlerait aujourd’hui un peu plus de 19 % de l’Ukraine, dont 7,3 % étaient déjà sous sa coupe avant 2022), soit environ 8 % du bloc formé par les États baltes, la Finlande et la Pologne.

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