Régulation démographique

Équipe Le Point Critique | 04 mai 2025

Loi sur la fin de vie, les 33 amendements les plus choquants

Les députés ont voté vendredi une nouvelle version de la loi sur la fin de vie. Elle sera débattue dans l’Hémicycle à partir du 12 mai. Nous présentons ici une liste de 33 amendements qui ont été soit rejetés soit adoptés, ainsi que l’exposé des motifs de la loi, qui permet de prendre la mesure du cynisme des parlementaires.

Perfusion

Le recensement proposé dans cet article est issu d’un message, posté sur son compte X, par le Dr Claire Fourcade, médecin coordinateur du pôle de soins palliatifs de l’hôpital de Narbonne et présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP). Les amendements peuvent être consultés ici.

Amendements rejetés

  1. Exclure les souffrances psychiques comme seul motif de recours à l’euthanasie ou au suicide assisté (nombreux amendements, dont : Isaac-Sibille, Modem, AS551 ; Firmin Le Bodo, Horizons & Indépendants, AS779 ; Bazin, Gruet, Républicains) Opposition du rapporteur de la loi, Olivier Falorni : « Il n’y a pas de hiérarchie entre les souffrances. » Pour rappel en 2024, avant la première défiguration du texte, il s’agissait de restreindre l’accès à l’euthanasie aux personnes atteintes d’une maladie grave et incurable, avec un pronostic vital engagé, et présentant des souffrances réfractaires.
  2. Exclure les personnes atteintes d’une déficience intellectuelle (Hetzel, Juvin, Républicains, AS568). La phrase qui a été récusée par la commission était : « Il est interdit d’appliquer l’euthanasie et le suicide assisté aux personnes atteintes de déficience intellectuelle. » Comprend-on les implications d’un tel rejet ?
  3. Ne pas donner suite aux demandes de personnes exprimant un sentiment d’indignité, qui se développe aujourd’hui fréquemment chez les personnes âgées en situation de dépendance ainsi que chez les personnes atteintes de maladies chroniques (Bazin, Républicains, AS286).
  4. Ne pas se trouver dans un état de faiblesse ou de vulnérabilité psychologique susceptible d’altérer son jugement pour remplir les conditions d’accès à l’euthanasie (Droite républicaine, AS51). Exemple : céder à un état dépressif transitoire.
  5. Exiger que la demande d’aide à mourir soit formulée par écrit, datée et signée par le patient lui-même afin de consigner cet acte dans son dossier médical. (Isaac-Sibille, AS553 ; Bazin, AS262, qui proposait l’enregistrement devant un notaire, comme c’est le cas en Autriche).
  6. Imposer l’avis d’un psychologue clinicien ou d’un psychiatre afin de s’assurer de s’assurer que le patient exprime une volonté libre et éclairée, à l’abri de toute pression ou influence extérieure, et qu’il dispose des capacités mentales nécessaires pour appréhender pleinement les conséquences de sa décision (Bazin, AS280 ; Hetzel, AS64 ; Portier, Républicains, AS16 ; Liégeon, Républicains, AS499). Cette précaution est intégrée dans la loi en Autriche, en Oregon et en Australie.
  7. Permettre au médecin de saisir un psychiatre lorsqu’il a des doutes sur le caractère libre et éclairé de l’expression de la demande du patient (Bazin, AS287 ; Hetzel, AS49).
  8. Évaluer le risque d’abus de faiblesse (plusieurs amendements).
  9. Imposer un avis écrit et motivé de l’ensemble de l’équipe pluriprofessionnelle vs l’avis écrit d’un seul médecin après avis pris auprès d’autres professionnels de santé, afin de formaliser la collégialité de la décision (Hetzel, AS519 et AS520).
  10. Rendre obligatoire la validation par un magistrat d’une procédure d’aide à mourir et de l’appréciation de la volonté libre et éclairée de la personne, comme cela est exigé dans le cadre du consentement pour le don d’organes (Isaac-Sibille, AS557 ; Juvin, AS1019 ; Gruet, AS243).
  11. Supprimer la possibilité d’abréger ou d’écourter le délai de réflexion de 48 heures requis pour que la personne confirme qu’elle souhaite toujours bénéficier d’une aide à mourir une fois que sa demande a été acceptée (Isaac-Sibille, AS559).
  12. Garantir les droits des majeurs protégés grâce à l’intervention du juge des tutelles (Bazin, AS297). Dans l’actuel projet de loi, le majeur protégé pourra solliciter et obtenir l’aide à mourir par décision motivée du médecin. La personne chargée d’une mesure de protection est alors simplement informée et a la possibilité de formuler des observations. Si elle estime que la décision d’aide à mourir est contraire aux intérêts de la personne, son avis n’est pas pris en compte. La loi consacre ainsi la toute-puissance du médecin qui aura donc droit de vie ou de mort sur les personnes dont l’état de santé est altéré par l’âge, le handicap, la maladie.
  13. Permettre un contrôle en amont de la procédure létale (nombreux amendements). L’un d’eux est emblématique de l’esprit de la loi (Juvin, AS980). Il prévoyait la suppression de l’article 12 pour la raison suivante : « Cet article est problématique car en cas de suspicion d’irrégularité dans la procédure létale et après le décès de la personne, il ne sera plus possible d’agir en justice pour dénoncer un abus ou une faute. Il y aurait dès lors une forme de quasi-irresponsabilité pénale. »
  14. Permettre au médecin de saisir le procureur de la République en cas de doute sur d’éventuelles pressions, avec interruption de la procédure et poursuite des auteurs si l’enquête confirme l’existence de ces pressions (Isaac-Sibille, AS559).
  15. Exclure l’acte létal des établissements de soins palliatifs (nombreux amendements). Plusieurs amendements, notamment l’AS345 (Bazin), l’AS880 (Pollet, Rassemblement national) et l’AS157 (Di Filippo), dénoncent la violation de la clause de conscience des établissements qui seraient dans l’obligation de laisser pénétrer les personnes pour qu’elles pratiquent l’euthanasie ou le suicide assisté, en contradiction avec le Code de la santé publique (L. 2212-8) et le droit européen.
  16. Encadrer l’acte létal en limitant les endroits où il peut être pratiqué (Hetzel, AS79 ; Juvin, AS976 ; Monnet, PC, AS536 ; Portier, AS19 ; Di Filippo, Républicains, AS156). En l’état, il pourra être effectué sur la voie publique, dans les établissements de santé, les établissements médico sociaux, d’enseignement, pénitentiaires ou psychiatriques, ce qui peut conduire à un manque de transparence et des abus qui seront incontrôlables.
  17. Prévoir une clause de « volontariat » pour les « professionnels de santé souhaitant intervenir dans le cadre de l’aide à mourir », la liberté de conscience des professionnels n’étant garantie que de manière théorique qui laisse craindre une forme de contrainte implicite ou de défaut d’information des professionnels (Hetzel, AS98). Le rapporteur craint un risque de « stigmatisation » des professionnels.
  18. Exclure les mineurs au moment de l’administration de la substance létale afin de les prémunir contre le risque de stress post-traumatique (Bentz, Rassemblement national, AS729).
  19. Empêcher que le médecin ne puisse abuser de sa position ou de son influence pour tirer un avantage quelconque de la part du patient. Ces dispositions figurent de longue date dans le Code civil, le Code de la santé publique (article R.4127-52 du code de la santé publique) et le Code de déontologie médicale (article 52). L’euthanasie sera donc une exception (Darrieussecq et Isaac-Sibille, Modem, AS621).
  20. Renforcer la position de la personne de confiance, en l’impliquant dans les différentes étapes du processus d’aide à mourir (Darrieussecq et Isaac-Sibille, AS622).
  21. Criminaliser les pressions éventuellement exercées sur le patient (Hetzel, AS48).
  22. S’assurer que le patient ait connaissance qu’il existe des alternatives, en l’occurrence la sédation profonde et continue jusqu’au décès associée à une analgésie (Hetzel, AS46)
  23. Garantir que la personne ait effectivement accès aux traitements adaptés et aux soins palliatifs (Hetzel, AS47 ; Bazin, AS278 ; Isaac-Sibille, AS550). L’amendement AS47estime ainsi qu’il serait « insupportable que la personne se résigne à “l’aide à mourir” faute d’un accès aux traitements ou à des soins palliatifs en raison de déserts médicaux ». Réponse d’Olivier Falorni : « Ce serait une atteinte aux droits des personnes malades. »

Amendements adoptés

  1. Création d’un « droit à l’aide à mourir » au sein du Code de la santé publique (Monnet, AS503 ; Leboucher, Nupes/LFI, AS676).
  2. Suppression du critère de maladie : l’affectation grave et incurable peut être d’origine accidentelle et pas seulement pathologique (Pilato, Nupes/LFI, AS683).
  3. Possibilité de se faire administrer la substance létale par un tiers (Delautrette, Nouvelle Union populaire écologique et sociale, AS1143).
  4. Caractérisation de la mort administrée comme une « mort naturelle »
 (Dubré-Chirat, Renaissance, AS586 ; Simonnet, Écologiste et Social, AS895). Il s’agit probablement du péché originel de la loi, qui fait voler en éclats tous les garde-fous éthiques. Le problème ne sera plus de savoir si la personne souhaitait réellement mourir ou si elle a été incitée à le faire, puisqu’elle sera juste décédée des suites d’une longue maladie (voir notre précédent article).
  5. Suppression du critère d’incapacité physique pour l’administration de la substance par un tiers 
(Leboucher, AS676) : l’euthanasie devient le principe et non l’exception. L’exposé précise : « Il s’agit de l’option la plus plébiscitée par la convention citoyenne sur la fin de vie. »
  6. Indifférenciation entre suicide assisté et euthanasie. Dans le texte initial, la personne ne déterminait avec le médecin que le nom du médecin ou de la personne chargés de l’accompagner pour l’administration de la substance létale. Ils choisiront ensemble les modalités d’administration de la substance létale (Députés socialistes et apparentés, AS442).
  7. Possibilité de refuser des soins palliatifs. Leur accès devient une option au même titre que l’accès à l’aide à mourir, au libre choix du patient (Pilato, AS687 ; Leboucher, AS1182). L’amendement revendique hypocritement « viser deux objectifs : garantir le libre choix du patient de bénéficier ou non de soins palliatifs et d’accompagnement ; et garantir l’accès effectif à ces soins dans le cas où la personne confirme qu’elle souhaite en bénéficier. » Le dernier point étant exclu du projet de loi, on peut définitivement redouter une incitation à choisir de mourir faute de soins.
  8. Suppression de l’obligation de recueil de l’avis de tous les professionnels qui interviennent auprès de la personne (Panifous, Nupes/LFI, AS1124).
  9. Suppression de toute mention spécifique au handicap (Panifous, AS1132), c’est-à-dire du devoir d’information et d’orientation spécifique aux personnes en situation de handicap.
  10. Obligation pour le pharmacien de réaliser et délivrer la substance létale dans un délai permettant l’administration de la substance à la date fixée (Delautrette, AS1145), sans possibilité d’exercer sa clause de conscience.

Certains amendements honteux été retirés ou ont été adoptés (AS512 sur la nécessité d’adapter l’information aux personnes protégées) contre l’avis du rapporteur général de la loi, Olivier Falorni, qui présentait en ces termes le projet de loi dans son exposé des motifs.

Les députés socialistes et apparentés soutenus par l’Association pour mourir dans la dignité (AMD) ne sont pas parvenus à ouvrir l’accès à l’aide à mourir aux personnes atteintes de troubles psychiques, comme la schizophrénie, la bipolarité, la dépression sévère et les troubles anxieux graves (AS421 et AS478), mais on leur doit les amendements les plus inquiétants de ce texte.

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