Haute tension

Équipe Le Point Critique | 30 novembre 2024

Ukraine, bilan de la semaine la plus dangereuse pour le monde

La guerre en Ukraine a dérapé le 17 novembre avec l'autorisation donnée à l'Ukraine de frapper le territoire de la Fédération de Russie avec des missiles occidentaux. La situation n’a cessé de se dégrader depuis. Retour sur les derniers développements du conflit.

Palais du Kremlin, Moscou
Palais du Kremlin, Moscou | © iStock/Andrefly

La France a annoncé le 23 novembre qu’elle ne s’interdisait aucune ligne rouge dans le soutien apporté à l’Ukraine, malgré la menace d’une riposte nucléaire de la part du Kremlin. Deux jours plus tard, le journal Le Monde révélait que le projet d’envoyer des troupes en Ukraine, dans le cadre d’une coalition européenne resserrée était de plus en plus âprement discuté par Londres et Paris. On connaît déjà le nom de la société préemptée par le ministère de la Défense (Défense Conseil international) pour –  officiellement – former des soldats ukrainiens sur le front. Ce soutien officialiserait ainsi le statut de la France de « nation belligérante », même si la présence actuelle de militaires français ne fait aujourd’hui aucun doute, les missiles occidentaux ayant besoin sur le terrain, selon un ancien militaire français, « d’une présence de spécialistes terrestres de l’OTAN ainsi que de renseignements aéroportés et spatiaux de cette même OTAN ».

La construction de l’escalade par le couple franco-britannique

L’objectif de cette nouvelle provocation serait d’envenimer suffisamment le conflit pour faire échouer le plan de paix que Donald Trump se targue de pouvoir imposer diplomatiquement et financièrement, en retirant son soutien à Kiev, dès le 20 janvier 2025. Cette grille de lecture est partagée par de nombreux observateurs, notamment celle du ministre russe des Affaires étrangères, qui évoque l’« héritage encombrant » que l’administration Biden souhaite laisser à son remplaçant. C’est en fait la seule façon d’articuler logiquement le refus viscéral d’une victoire de la Russie, exprimé à maintes reprises pas Emmanuel Macron, et la probabilité de plus en plus élevée que Donald Trump réussisse son pari.

Le reporter de guerre Régis Lesommier, qui s’est rendu à plusieurs reprises sur le front, et l’ancien ministre Pierre Lelouch, spécialiste des questions internationales alertent tous les deux sur la folie d’une telle stratégie, dont les chances d’aboutir sont quasi nulles compte tenu de la réalité du terrain, et dont on peut craindre au contraire qu’elle conduise à un engrenage fatal :

Supposez que vous mettiez des forces françaises aujourd’hui le long de la ligne de front, ou même derrière, à partir de ce moment-là, elles seront considérées comme belligérantes. Les Russes cibleront ces forces. Ils tueront 100, 200, 1 000 soldats français. Qu’est-ce qu’on fait à ce moment-là ?

Ukraine/Russie : un ancien ministre dénonce l’inconscience des élites françaises ! Pierre Lellouche. Tocsin. 25/11/204

Même les Ukrainiens sont réservés sur la pertinence de l’initiative française qui ne fera que reculer l’échéance de la paix :

Si les troupes françaises ou d’autres pays entrent en guerre ici, ce serait forcément une protection. Mais d’un autre côté, ce pourrait aussi être une escalade encore plus grande dans ce conflit.

https://x.com/BFMTV/status/1861161811963215909

Les appels à la guerre de l’Occident

Plusieurs responsables occidentaux se sont exprimés publiquement depuis.

  • Le porte-parole de la Sécurité nationale de la Maison-Blanche, John Kirby, a confirmé lundi que Washington avait bien autorisé l’Ukraine à utiliser les missiles longue portée de fabrication américaine contre des cibles situées à l’intérieur de la Russie, et sélectionnées par le Pentagone. La véritable information n’est pas que Washington ait approuvé ces tirs, l’Ukraine ne pouvant pas techniquement être autre chose que la « main guidée » qui les déclenche, mais qu’il l’ait fait en ayant conscience des risques, la Maison-Blanche ayant attendu de voir comment ces attaques seraient accueillies par la Russie et les Occidentaux pour en revendiquer officiellement la responsabilité. L’escalade est donc pleinement assumée :

Ils sont capables d’utiliser l’ATACMS pour se défendre sur un besoin immédiat, et en ce moment, c’est compréhensible, cela a eu lieu dans et autour de Koursk. Nous avons modifié les orientations et leur avons donné des orientations pour les utiliser pour atteindre ces types particuliers d’objectifs.

https://meduza.io/en/news/2024/11/26/white-house-confirms-officially-this-time-that-kyiv-has-biden-s-permission-to-fire-atacms-into-russia
  • Le président du Comité militaire de l’Alliance, l’amiral néerlandais Rob Bauer a appelé le même jour l’ensemble des entreprises de la coalition à se préparer à un « scénario de guerre » dans l’éventualité où la Russie attaquerait en premier, ce qui est la condition sine qua non pour déclencher la mise en œuvre de l’article 5 du traité de l’Alliance, en l’absence de véto de l’un des pays membres. Il a également exhorté les citoyens européens à faire preuve de « sagesse » et à envisager leur sacrifice économique et humain, auquel Emmanuel Macron avait affirmé en juin dernier que la France était préparée, comme un impératif moral face à la certitude d’une invasion de l’Europe par la Russie, dont le Pentagone ironisait pourtant il y a quelques jours sur l’incapacité à conquérir l’Ukraine, ce minuscule timbre-poste sur la carte du monde :

Si vous renforcez votre dissuasion et si vous augmentez votre soutien à l’Ukraine, il y aura moins d’argent à dépenser pour d’autres choses et cela nous privera de certains de nos luxes, cela exigera des sacrifices, et cela signifiera que nous devrons prendre des risques. Mais ne pas prendre de risques est le plus grand risque.

https://x.com/camille_moscow/status/1861710186873770174
  • Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken a assuré ce mardi, en marge d’une réunion du G7, que les États-Unis feraient le nécessaire pour que l’Ukraine dispose de l’ensemble des ressources financières, militaires et humaines nécessaires « pour combattre efficacement l’agression russe ou négocier la paix en position de force en 2025 ». La paix est donc, théoriquement du moins, une option pour Washington. Faut-il comprendre cette déclaration comme un rétropédalage des États-Unis ou comme une simple manœuvre dilatoire ?

L’Occident semble en tout cas déterminé à pousser la Russie à la faute. Les appels à la guerre se sont multipliés en France en début de semaine, avec notamment :

  • la déclamation théâtrale du député Raphaël Glucksmann (Place Publique), « l’homme de l’Ukraine » selon le site Euractiv, qui rappelle le passé trouble du personnage, dont tout le parcours politique est axé sur le même objectif : fomenter des révolutions de couleur visant à empêcher des États souverains d’entretenir des relations pacifiques avec la Russie. Mardi dernier, il dénonçait « les capitulards » qui refusent une escalade guerrière en prônant un renforcement des livraisons d’armes comme seul et unique chemin vers la paix. Un discours calé sur celui, suprêmement fumeux, du chef de l’État qui estimait le 22 septembre 2024, que « Faire la paix, c’est trahir ».
  • le coming out de l’ancien ministre Bernard Kouchner, qui s’est déclaré favorable à l’envoi de troupes en Ukraine, et donc à une déclaration de guerre adressée à la Russie. Il assume, ou presque :

Oui, je pense que… C’est pas facile à dire de déclencher la guerre pour son propre pays. C’est pas facile. Ça veut dire que ça va coûter des sacrifices.

https://x.com/FilFrance/status/1860712125930373533

La surdité de l’Occident aux mises en garde du Kremlin

Moscou est passé en quelques jours de l’avertissement, avec le test de son nouveau missile hypersonique le 21 novembre – « Des menaces russes sans crédibilité » selon l’ancien officier Guillaume Ancel, qui exhorte la France à « ne pas subir » – à l’annonce le 26 novembre, par le ministère de la Défense, de la préparation d’une riposte au lendemain d’une série de nouveaux tirs de missiles occidentaux. La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, et le vice-président du Conseil de sécurité russe, Dimitri Medvedev, ont tous les deux confirmé cette position le lendemain. Ce message a été porté au Conseil des Nations-Unies, où l’ambassadeur adjoint de la Russie à l’ONU, Dmitry Polyansky, a déclaré le 28 novembre :

La Russie vous a prévenu ! Attendez notre réponse. L’escalade de la part de l’Occident sera suivie d’une réponse décisive de la Russie. Le régime de Zelensky n’a pas écouté l’avertissement de la Russie et a décidé de tester à nouveau sa détermination.

https://twitter.com/BowesChay/status/1861830644780650902

La France a répondu par une nouvelle surenchère en laissant fuiter le contenu d’un entretien téléphonique entre le président ukrainien et Emmanuel Macron, lors duquel le chef de l’État aurait réaffirmé l’inconditionnalité du soutien de la France :

Ces frappes, la coopération accrue avec la Corée du Nord, et la rhétorique irresponsable qui les accompagne, participent d’une logique d’escalade inacceptable de la part de la Russie, qui continue de poursuivre un dessein révisionniste, brutal et impérialiste en violation des droits souverains de l’Ukraine et de la Charte des Nations Unies. [Cette logique d’escalade] n’aurait pas raison de notre détermination à continuer d’aider l’Ukraine aussi intensément et aussi longtemps que nécessaire, afin qu’elle puisse exercer son droit à la légitime défense et que la guerre d’agression de la Russie soit mise en échec.

https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20241129-ukraine-macron-d%C3%A9nonce-une-logique-d-escalade-inacceptable-de-la-russie?utm_medium=social&utm_campaign=x&utm_source=user&utm_slink=f24.my%2FAmKB

Là encore, si l’on considère que la Russie bluffe car elle n’a pas encore mis ses menaces à exécution, on peut toutegois se demander si la France n’en fait pas de même puisqu’Emmanuel Macron a simplement a qualifié de simple « option » l’utilisation de missiles longue portée sur des cibles russes. Interrogé le 24 novembre dernier (00:16:29) sur cette même question et sur celle de l’envoi de troupes en Ukraine, Jean-Noël Barrot a lui aussi botté en touche renvoyant aux déclarations et à la détermination du chef de l’État, mais sans expliquer pourquoi ces missiles, contrairement à ceux livrés par les États-Unis et le Royaume-Uni, n’avaient toujours pas été utilisés sur le sol russe.

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