Collusion
Création d’un partenariat entre Pfizer et l’AP-HP, une liaison très dangereuse
L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a démontré pendant la pandémie la puissance de son influence sur les décisions sanitaires prises par le Gouvernement. Elle a fourni pendant près de deux ans une armée de VRP dont aucun n’a remis en cause ni la précocité de l’homologation des vaccins ni les performances revendiquées par les laboratoires. L'annonce d’un partenariat conclu avec le laboratoire Pfizer impliquant également le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) soulève d’immenses inquiétudes quant à l’indépendance de la future politique vaccinale.
De nombreux observateurs se sont inquiétés en 2022 de la préemption des décisions sanitaires par le cabinet McKinsey sous le mandat d’Olivier Véran. Nous avons dénoncé l’omniprésence de son ombre dans un précédent article, en pointant les liens bilatéraux que ce cabinet, cofondateur d’En Marche !, entretient factuellement avec le laboratoire Pfizer.
La récente nomination au poste de ministre de la Santé d’Aurélien Rousseau – dont l’épouse Marguerite Cazeneuve, ancienne consultante pour le cabinet McKinsey, se trouve être l’actuel numéro deux de la Caisse nationale d’assurance maladie et une – avait renforcé ces inquiétudes. On se souvient notamment de l’affaire du bamlanivimab, dont le journal Libération avait pointé le possible conflit d’intérêts ayant conduit à la commande massive de doses d’un « médicament innovant » qui s’est avéré a minima parfaitement inefficace. Le laboratoire n’a d’ailleurs pas reconduit sa demande d’autorisation de mise sur le marché en Europe, ce qui est un fait suffisamment rare pour être souligné. L’ancien directeur de cabinet d’Élisabeth Borne vient d’être blanchi par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) qui a estimé dans l’avis, rendu le 25 juillet dernier, qu’il peut exercer librement ses nouvelles fonctions.
L’annonce par le laboratoire Pfizer le 29 juin 2023, au lendemain du sommet Chose France, d’un « parrainage stratégique pluriannuel avec BioLabs, le réseau international d’incubateurs ouvert aux scientifiques, start-ups en biotechnologies et sciences de la vie à haut potentiel » est-elle le dernier clou planté dans le cercueil de la démocratie sanitaire ? Le géant pharmaceutique n’a pas caché sa joie d’avoir réussi à pénétrer un peu plus profondément un territoire acquis à sa cause bien avant l’élection d’Emmanuel Macron, qui a conquis son titre de Mozart de la finance grâce à un deal historique, crucial pour le laboratoire. Un énième retour d’ascenseur en quelque sorte :
« Dans le cadre de ce partenariat, Pfizer devient l’un des 3 sponsors fondateurs pharmaceutiques du site BioLabs Hôtel-Dieu à Paris dont l’ambition est de créer un écosystème puissant d’innovation dans les sciences de la vie. BioLabs Hôtel-Dieu offre depuis février 2023 un lieu unique au cœur d’un pôle d’innovation biotechnologique avec des espaces de laboratoire entièrement équipés. Sa collaboration avec l’AP-HP crée un espace de coworking de premier plan pour les sciences de la vie à Paris, connecté aux 39 hôpitaux de l’AP-HP, offrant ainsi un lieu idéal pour l’innovation.
Cette collaboration intervient alors que Pfizer vient d’annoncer lors du Sommet Choose France son intention de doubler son investissement en France avec 500 millions d’euros supplémentaires sur les quatre prochaines années pour soutenir la recherche et l’innovation en santé. Ils s’ajoutent aux 520 millions d’euros d’investissement annoncés en 2022 dont plus de la moitié a déjà été engagée pour contribuer à l’avancement de projets de R&D, d’essais cliniques et de fabrication de médicaments en France. L’entreprise s’est aussi engagée à évaluer l’avancement des projets dans les prochaines années, en vue d’investir un milliard d’euros supplémentaires entre 2025 et 2026.
Pfizer renforce son intégration dans l’écosystème des start-ups en biotechnologies en France, en offrant aux chercheurs et entrepreneurs en résidence à BioLabs Hôtel-Dieu l’accès aux meilleures expertises scientifiques et technologiques, pour qu’ils puissent expérimenter, développer et approfondir leurs idées. »
Deux faits sont particulièrement inquiétants :
- Pfizer aura un siège au sein du comité de sélection de BioLabs Hôtel-Dieu où il pourra participer, en qualité de membre fondateur, au processus de sélection des start-ups ;
- la directrice de BioLabs France, Johanna Michielin, est également directrice de recherche au CNRS.
Elle n’a pas manqué de remercier le laboratoire dont personne ne peut douter qu’il inondera très bientôt l’Hexagone de produits innovants, sûrs et efficaces :
« Nous sommes ravis d’élargir l’accès à des installations de pointe pour les scientifiques et les entrepreneurs en Europe sur notre site BioLabs Hôtel-Dieu. Nous sommes reconnaissants envers Pfizer pour son soutien et nous nous réjouissons de travailler ensemble pour soutenir ces entrepreneurs early-stage et accélérer les percées dans le domaine de la santé humaine. »
Le CNRS aurait-il remis en question l’origine du virus comme il le fit en 2020 au risque de dévoiler l’agenda réel de fabrication du vaccin Pfizer-BioNTech, s’il avait été aussi intimement engagé avec le géant pharmaceutique ? L’AP-HP jouera-t-elle à nouveau le rôle de principal distributeur des injections proposées par Pfizer en cas ne nouvelle pandémie ?
La rémunération allouée en 2021 par le laboratoire au Pr Xavier Lescure (hôpital Bichat, AP-HP), alors conseiller en charge de la lutte contre le COVID-19 au ministère de la Santé et des Solidarités, laisse peu de place au doute et suggère qu’en cas de conflit d’intérêts, nous ne pourrons compter que sur la vigilance des lanceurs d’alerte pour les dénoncer. Anticor ne sera, hélas !, d’aucune utilité cette fois, puisque son agrément lui a été retiré. Bienvenue dans le monde d’après où lorsque la température devient critique, la meilleure réponse reste encore de casser le thermomètre.